Formation professionnelle : le big-bang ou la retouche pour 2014 ?
24/01/2014Cette semaine, le Conseil des ministres a adopté le projet de loi sur la formation professionnelle, marquant une nouvelle étape dans la refonte du système de formation en France.
Une procédure accélérée
Ce projet est l’aboutissement d’un travail entamé dès 2013. En janvier de cette année-là, un premier Accord National Interprofessionnel (ANI) avait prévu une réforme globale du dispositif de formation professionnelle, souvent critiqué pour sa complexité et son inefficacité.
Transcrit dans la grande loi de sécurisation de l’emploi, cet accord avait laissé aux partenaires sociaux le soin d’apporter des précisions sur le texte. La négociation fut rapide : dès décembre 2013, un deuxième ANI spécifique à la formation professionnelle fut signé, aboutissant à l’adoption du projet de loi en Conseil des ministres début 2014.
L’une des principales innovations de cette réforme est la création du Compte Personnel de Formation (CPF), présenté par le ministère du Travail comme une avancée majeure.
Le CPF : un dispositif plus universel
Le CPF remplacera le DIF (Droit Individuel à la Formation) en 2015, ce dernier ayant souffert d’un manque d’utilisation par les salariés. Contrairement au DIF, le CPF sera rattaché à l’individu et non à son employeur, ce qui signifie que les droits à la formation suivront chaque personne tout au long de sa vie professionnelle, y compris en cas de changement d’emploi ou de période de chômage.
Le CPF sera accessible :
- Dès 16 ans pour toute personne occupant un emploi ou recherchant un emploi,
- Dès 15 ans pour les jeunes en apprentissage,
- Jusqu’à la retraite.
Ce changement vise à favoriser l’accès à la formation et à garantir aux salariés une montée en compétences tout au long de leur carrière.
Un financement qui divise
Si le CPF constitue une avancée sociale notable, son financement reste un sujet sensible.
- La CGPME (Confédération Générale des Petites et Moyennes Entreprises) a refusé de signer l’accord de décembre, estimant que cette réforme alourdirait les charges des petites entreprises.
- Le MEDEF a exprimé ses craintes quant à un surcoût pour les employeurs, qui risqueraient de devoir assumer de nouvelles contributions pour financer le CPF.
Il est donc encore incertain de savoir comment les entreprises s’adapteront à cette nouvelle donne et si les salariés utiliseront effectivement ce compte pour se former. La réforme sera-t-elle le big bang promis ou simplement une nouvelle tentative de réforme dont l’impact sera limité ?
2014, une année clé pour la formation en portage salarial
Cette réforme aura aussi un impact sur le secteur du portage salarial, qui doit désormais intégrer la formation comme un volet central de son activité.
Depuis mai 2013, un arrêté du ministère du Travail a mis en place un cadre juridique pour le portage salarial, imposant aux sociétés de portage d’accompagner et de former les experts qu’elles salarient.
L’accord du 24 juin 2010, étendu en 2013, prévoit une période de transition de deux ans pour permettre aux entreprises de portage de se conformer à ces nouvelles obligations. L’année 2014 marque donc un tournant décisif : elles devront prouver leur capacité à proposer des formations adaptées aux besoins des travailleurs indépendants qu’elles accompagnent.
Ce changement pourrait renforcer l’attractivité du portage salarial, en en faisant un véritable levier de montée en compétences pour les experts qui choisissent cette forme d’emploi. Il s’agit d’une véritable révolution dans un secteur où la formation était jusqu’ici perçue comme secondaire.
Vers un nouveau paysage de la formation en France
Avec cette réforme, l’objectif du gouvernement est clair : simplifier et dynamiser l’accès à la formation, pour mieux répondre aux mutations du marché du travail.
Toutefois, la réussite de cette transformation dépendra de l’appropriation du CPF par les salariés et les entreprises, ainsi que de la capacité des acteurs du marché, notamment dans le portage salarial, à mettre en place des dispositifs de formation efficaces et adaptés aux besoins de chacun.
Reste à voir si cette réforme tiendra ses promesses et apportera un véritable big bang ou si elle ne sera qu’une retouche de plus dans un système qui peine à se réinventer.