Search picto Magnify Search picto Close

Interview : Jean-François Bolzinger, Président de l’OPPS

20/11/2012

Propos recueillis le mardi 20 Novembre 2012 par le Guide du Portage

Jean-François BOLZINGER, Président de l’OPPS, Secrétaire général adjoint de l’UGICT-CGT (la CGT des Cadres) exprime son opinion quant à la fusion des deux principaux syndicats patronaux du portage salarial, le SNEPS et la FeNPS qui a abouti à la création du PEPS le mardi 13 Novembre 2012.

Guide du Portage : Jean-François Bolzinger bonjour. En qualité de président de l’OPPS (Observatoire Paritaire du Portage Salarial) comment analysez-vous la fusion des deux syndicats des employeurs qui a donné naissance au PEPS ?

JF. Bolzinger : C’est une bonne nouvelle pour le dialogue social. Depuis quelques années, le Gouvernement précédent avait mandaté le PRISME, l’organisation patronale de l’intérim, en excluant de fait les principaux acteurs du portage salarial du dialogue. Eux-mêmes s’étaient divisés en trois syndicats : le SNEPS, la FeNPS et l’UNEPS. C’était original les organisations patronales étaient divisées alors qu’il existait une unité syndicale des représentants des salariés.

La FeNPS en particulier était réticente à l’égard de l’accord du 24 juin 2010 à l’image du Gouvernement précédent qui n’était pas favorable à son extension. Le Gouvernement actuel est plus à l’écoute du dialogue social. Dans cette nouvelle donne, il était important que les partenaires sociaux aient une position constructive sur cet accord.

GdP : Vous êtes le secrétaire général adjoint de l’UGICT-CGT (la CGT des Cadres et des Techniciens) et l’un des principaux artisans de l’accord du 24 juin 2010 qui a vocation à encadrer le portage salarial. Pourriez-vous nous éclairer sur le sens de la signature de cet accord par la CGT?

JF. Bolzinger : La CGT était initialement opposée par principe au portage salarial qui pouvait représenter une déréglementation, une remise en cause des garanties assurées par le Code du travail. Certaines sociétés de portage ont tenté de dévoyer le statut et se cantonnaient au rôle de « boite aux lettres ». De nombreuses actions en justice étaient intentées pour « prêt de main d’œuvre illicite». Il a fallu définir un cadre au portage salarial pour qu’il soit plutôt perçu comme une activité d’accompagnement des portés. Nous avons instauré certains garde-fous qui nous semblent suffisants et avons abouti à un compromis qui évite les risques de débordement.

GdP : Quelle est la position du Gouvernement actuel sur l’extension de cet accord? Si l’extension de cet accord était décidée par le Gouvernement quelles seraient, selon vous, les étapes ultérieures nécessaires pour optimiser le cadre légal du portage salarial ?

JF. Bolzinger : Au sein du Cabinet de Michel Sapin, un conseiller a été chargé de l’évolution du statut à la différence du Gouvernement précédent qui l’ignorait. Le mandat alors donné par le précédent Gouvernement à l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) avait un objectif dilatoire pour retarder l’encadrement du secteur.

A ce jour, nous avons rencontré avec l’ensemble des syndicats signataires de l’accord du 24 juin 2010 le conseiller du Ministre. La Direction Générale du Travail (DGT) est en train d’évaluer les problématiques juridiques inhérentes à l’extension de l’accord de 2010. Dans un avenir assez proche, à partir du moment où le PEPS a affiché une attitude constructive, nous devrions aboutir à une stabilisation du portage salarial qui nous permettra d’éviter certaines pratiques.

Une première phase consiste en la mise en œuvre de l’extension totale ou partielle de l’accord . Celle-ci peut-être rapide. L’accord prévoit ensuite la négociation durant une période de deux ans, au cours de laquelle nous devrons préciser les aspects du contrat de travail des portés. L’important est qu’aujourd’hui de nombreux juristes accompagnent avec attention ce processus. Il y a quarante ans, l’intérim était un secteur miné par les pratiques illégales. L’intérim a depuis été encadré et stabilisé. A mon sens, le portage salarial doit suivre le même chemin en se stabilisant et en se débarrassant des pratiques douteuses de certaines sociétés.

GdP : Pensez-vous qu’au sujet du portage salarial, les partenaires sociaux ont réussi à bâtir un véritable dialogue social? Comment réagissent vos adhérents cadres de l’UGICT-CGT à cette évolution qui s’organise du cadre légal du portage salarial ? 

JF. Bolzinger : Oui, je le pense. Nous avons une unité syndicale solide et un travail constructif avec les sociétés qui dépendent maintenant du PEPS. Les blocages qui restaient devraient disparaître rapidement.

 

Du côté de la CGT, nos adhérents cadres ont adopté une démarche pragmatique. Ils recherchent un encadrement solide. Certaines sociétés ne payaient pas les salariés portés avant de recevoir elle-même le règlement de la facturation. L’accord doit permettre d’éviter que ce soit le salarié qui subisse les conséquences d’un retard de trésorerie. Les sociétés de portage ne doivent plus être de simples « boites aux lettre ».

Concernant les représentants de sociétés de portage, la FeNPS avant la fusion avait effectué un lobbying conséquent auprès de la majorité parlementaire précédente. La création du PEPS dégage notre horizon en attribuant aux organisations syndicales un interlocuteur qui s’engage pour plus d’encadrement du portage.

GdP : Vous avez publié le 25 octobre 2012, un ouvrage co-signé avec Marie-José KOTLICKI, Secrétaire générale de l’UGICT-CGT intitulé « Laissez-nous bien travailler ! Manager sans Wall Street » (Editions de l’Atelier, 2012) qui prône une revalorisation du travail et une transformation du management comme issue aux crises sociales et économiques. L’évolution actuelle du portage salarial va-t-elle dans le sens de cette évolution que vous prônez ?

JF. Bolzinger : Oui, le titre de cet ouvrage rappelle que la finance ne peut pas être le seul fil conducteur des entreprises. Cette dynamique s’applique tout à a fait au portage salarial qui a toute sa place comme nouvelle forme d’emploi si elle est bien encadrée et non dévoyée au détriment des salariés.

Dans une démarche où les salariés ont d’avantage de pouvoir sur leur travail, ils ont besoin de reconnaissance, d’un rôle contributif. L’évolution du portage salarial va exactement dans ce sens.

Cet ouvrage qui est le fruit de consultations de trois ans révèle que les logiques managériales en place tuent le travail. C’est quasiment un Guide pour les managers que nous proposons.

Propos recueillis le mardi 20 Novembre 2012 par le Guide du Portage